Brame 2014 (2)

Comme j’avais commencé à en parler lors du billet précédent : Cela faisait 1h30 que j’étais à l’affût, lorsque ce cerf de 8 cors est venu me rendre visite. 4 cerfs bramaient autour de moi mais ils restaient au bois. Celui là est venu faire un tour dans la clairière pour voir si il y avait de l’activité. Ce que je ne savais pas encore c’est que j’avais en face de moi le futur maître de la place ! Longtemps dominé par un cerf que je vous présenterais plus tard, il pris le pouvoir lors d’un combat anthologique, que j’ai eus la chance d’observer. Hélas il faisait trop sombre pour que je puisse faire des photos. Ça sera donc les uniques clichés du maître de la place.

photo de cerf elaphe pendant le brame en Chartreuse - Thomas Capelli

Brame du cerf en chartreuse  - Thomas Capelli Photo de cerf dans la parc naturel régional de chartreuse  - Thomas Capelli

— A suivre —

Brame 2014 : introduction

Chaque année en septembre, les nuits se rafraîchissent et les cerfs réapparaissent des confins des forêts de Chartreuse pour se reproduire. Une rude compétition d’environ 1 mois se déroule entre les cerfs pour les beaux yeux des biches. Les vieux cerfs dominants vont se battre jour et nuit, pour surveiller la harde des biches, et décourager les cerfs satellites qui essayent de leurs voler leurs promises. Les vainqueurs de cette compétition pourront ainsi s’accoupler avec les biches lorsque ces dernières seront en oestrus.

Tout comme les parades des tétras lyres, le brame est un moment particulier dans l’année pour moi. C’est le moment de plonger en immersion dans les vieilles forets de Chartreuse pour essayer d’observer le plus grand de nos cervidés : le Cerf Elaphe. Je vais tenter de vous expliquer comment j’ai procédé pour cette saison 2014 : Comme souvent j’ai privilégié l’affût pour tenter de faire des photos : je construis une petite planque avec des branchages et je complète avec quelques filets de camouflage, et bien entendue je m’habille d’une tenue camouflage + gants et cagoule. J’utilise également une toile nommé « Fantôme des bois » qui est légère et pratique pour de courts affûts. Pour des affûts plus longs, et pour plus de confort, on peut aussi construire des affûts plus élaborés, plus confortables ou utiliser des tentes spécialement conçues pour ça, mais ce ne fut pas le cas pour moi.

J’ai fait le choix de ne faire que de l’affût durant ce brame et de ne pas tenter d’approche en forêt, la durée moyenne des affut était de 3h30 (et je peux vous  jurer que c’est long quand on ne voit rien !). Le brame est une période très éprouvante pour les cerfs, ils ne mangent plus, ne dorment plus et passent leur temps à veiller sur les biches et à écarter leurs rivaux. Ils peuvent perdre jusqu’à 1/3 de leur poids durant cette période. Il n’est pas rare de voir des cerfs à bout de forces à la fin de la période de brame. De plus la période des chaleurs des biches dure à peine plus de 24h, il ne faut donc pas les déranger pendant ce court laps de temps sous peine de perturber la reproduction.

Aussi vous comprendrez que je resterais très discret sur mes lieux de prospection. Aucune indication ne sera donnée, ni dans les textes, ni dans les photos qui seront prochainement publiées. Certaines personnes ne sont pas aussi précautionneuses que moi, et ne se gênent pas pour publier sur la toile et les réseaux sociaux les emplacements des places de brame, ce qui a pour conséquence d’augmenter la présence humaine sur les places, et donc le dérangement des cerfs, et c’est bien dommage ! J’ai abandonné la première place de brame que j’avais trouvé en 2009 parce qu’elle était tellement connue qu’il ne se passait pas un soir sans qu’une personne ne se pointe dans la clairière pour aller voir les cerfs. L’activité des cerfs était donc devenue exclusivement nocturne à cause du dérangement humain, et cette année ça ne bramait presque plus là bas. Cette année j’ai eus la chance d’observer et d’écouter mon plus beau brame depuis plus de 10 ans, avec des cerfs en activité quasiment toute la journée pendant 1 mois. Hélas, je sais que ça ne sera pas forcément le cas les prochaines années, pour les raisons citées précédemment …

Durant mes nombreux affûts j’ai eus la chance de croiser un bon paquet d’autres animaux : sangliers, blaireaux, chevreuils, chamois, mouflons, chouette hulotte, et d’autres animaux plus rares comme l’aigle royal, le renard, ou encore la minuscule chouette chevêchette d’Europe. Cette petite chouette par son chant mélodieux, annonçait l’aube et/ou le crépuscule de la plupart de mes longs affûts.

Chouette chevêchette d'Europe dans une foret de chartreuse - Thomas Capelli

photo d'un renard malade - Thomas Capelli photo d'un renard - Thomas CapelliEt puis, en cette soirée du 22 septembre, dernier jour de l’été, alors que j’entends les cerfs bramer partout autour de mois depuis 1h30, le premier cerf de l’année fait son apparition.

Cerf elaphe pendant le brame - Thomas Capelli

— A Suivre —

Au cœur de l’arène (Epilogue)

Suite et fin des photos des parades de tétras lyre pour cette année. Comme je le disais précédemment j’ai été obligé de réaliser toutes les images qui suivent à main levée, car les coqs sont venus derrière ma tente. Heureusement j’avais laissé la porte de derrière entre ouverte. Alors couché en travers à en prendre des crampes, tremblant comme une feuille, je me suis régalé ! 2 tétras lyre sont venus tellement près que j’ai crus qu’ils allaient rentrer dans la tente me dire bonjour ! L’instant a duré seulement 5 minutes, mais c’était 5 minutes que je ne suis pas prêt d’oublier !

Tétras lyre posé dans l'alpage photo des parades du tétras lyre en Chartreuse - thomas capelli Le tétras lyre se rapproche - thomas capelli le tétras lyre pousse son cri - thomas capelli portrait tétras lyre - thomas capellichant d'un tétras lyre pendant les parades - thomas capelliphoto des parades du tétras lyre en Chartreuse - thomas capelli

Comment est ce possible qu’un oiseau aussi invisible tout le reste de l’année, se montre sans aucune pudeur pendant les pariades ? Est-ce la testostérone qui les rends si indifférents ? Avoir la chance d’observer ces moment est un cadeau de la nature, un cadeau qui n’a pas de valeur ! Alors il faut que tous les utilisateurs de la nature se montrent respectueux de cet oiseau, car l’espèce amorce désormais sa disparition et il serait dommage que dans 10 ou 20 ans, nous ne puissions plus contempler les parades ! Des précautions sont nécessaires pour observer ces oiseaux pendant cette période cruciale, pour que l’espèce se reproduise. J’espère en prendre assez pour ne pas trop déranger…

le coq de bruyère en pleine parade - thomas capelli

Au cœur de l’arène (L’action)

Comme je le disais dans l’article précédent : Une fois le jour levé, il est temps de faire des photos… Oui mais voilà les coqs ne sont que 2 (contre 5 la veille). Que se passe il ? est-ce déjà la fin des parades pour cette année ? Tout est très calme, trop calme, les coqs restent chacun de leurs côté, j’observe quelques sauts nuptiaux, mais il manque de  la lumière pour pouvoir les photographier ( déjà qu’avec le contre jour et le ciel nuageux, j’ai beaucoup de mal à gérer l’exposition et la lumière…. alors figer des sauts : mission impossible !) L’heure avance, 6h30, ils sont là depuis 1h15 et c’est toujours aussi calme. Si ils font comme la veille, dans 30 minute je peux me recoucher !

chant du tétras lyre dans l'arènecoq de bruyère en chartreuse

6h45, le coq du bas se décide enfin à attaquer, mais le chef veut conserver sa place. L’arène est très hiérarchisée : Comme les années précédentes, c’est le coq du haut qui domine, et les coqs du bas qui viennent le défier. Les 4 ou 5 combats que j’ai pu voir se passent tous  exactement au même endroit ! C’est vraiment une guerre de territoire.

combat des tétras lyre - thomas capelli combat des tétras lyre en chartreuse - thomas capelli pariades des tétras lyre en chartreuse - thomas capelli

6h50 : Une poule se met à chanter, et tout s’active : les combats redoublent d’intensité et les coqs sortent de partout. J’ai à nouveau tous les coqs sur la place. Impossible de voire la poule, elle est dans les rhododendrons, mais je l’entends et les coqs aussi l’entendent. La nature m’offre 15 minutes de folie, 15 minutes de récompense après tous ces efforts et toute cette attente ! Les coqs sortent dans tous les sens et le coq dominant essaie de chasser tous les assaillants. Toute la scène se passe trop loin de mon affût, je profite du spectacle sans faire de photos…

Quand soudain un coq vient se poser juste derrière ma tente. Heureusement j’ai laissé l’abside de derrière ouverte, je démonte l’appareil du trépied, me couche comme je peux et tente quelques photos à main levée à travers l’ouverture.

tétras lyre les ailes ouvertes - thomas capelli— A suivre —

 

 

Au cœur de l’arène (Préambule)

Lorsqu’on l’a vécu une fois, on ne peut s’empêcher d’y remonter. Alors à chaque printemps c’est l’éternelle expédition pour aller voir les pariades des tétras lyre. Ces cérémonies très codifiées, où les coqs se livrent à de réelles joutes se déroulent là haut. Tandis qu’en bas le printemps s’est installé et la nature à repris ses droits, en haut, le froid et la neige ne veulent pas quitter nos montagnes. L’hiver lutte pour survivre, tout est désert, plus un bruit, la plupart des animaux sont redescendus pour profiter de la végétation toute neuve.

Assister aux pariades des tétras lyre, ce n’est pas qu’une partie de plaisir, c’est une épreuve sadique : alors qu’il fait chaud en bas, il faut retourner en hiver, accepter d’avoir à nouveau froid, accepter les vents, la neige, la brume, l’humidité, et aussi accepter les échecs. Il faut aussi savoir renoncer lorsque les conditions ne sont pas bonnes, ou lorsque le manteau neigeux devient instable. Ceux qui me suivent sur Facebook ont pu voir que j’ai dus rebrousser à 4h45 du matin et à seulement 800m de la place de chant, perdu dans le brouillard en pleine nuit, … Parfois il faut être raisonnable et accepter de renoncer, c’est plus prudent ! Mais pour le passionné qui accepte de relever le défi, la récompense d’avoir la chance d’observer ce magnifique spectacle est d’autant plus grande.

Voici quelques chiffres pour cette saison 2014 : 

1h15 du matin : c’est à peu près l’heure à laquelle je me levais pour partir et pouvoir être en place avant 4h30 sur la place de chant

– 4960m de dénivelé positif effectués

54km parcourus et 20h54 de temps de marche

Entre 17kg et 20kg dans le sac à dos. (le matériel photo, l’affût, des vêtements chaud, au début les raquettes, une pelle, à boire, à manger, …)

6 sorties, et une seule qui s’est avérée à peu près payante.

Je ne connais qu’une seule place de chant qui soit assez intéressante pour aller faire de la photo. J’espérais avoir le temps d’en chercher une autre mais les conditions météo (pluie, neige, et encore pluie) ne me l’ont pas permis. Alors pour espérer voir ces superbes oiseaux, je me suis acharné sur cette place. J’ai du me remotiver, voire même me faire violence, lorsque échec après échec il fallait encore se tirer d’un lit douillet dans lequel je dormais depuis à peine 3h pour aller marcher dans le noir, en empruntant toujours le même chemin, bercé au chant des chouettes, et au bruit des ruisseaux dans lesquels déferlent les eaux glaciales de la fonte des neiges.

Et puis, lorsqu’un matin, enfin toutes les conditions sont réunies, et que la chance veut bien être de la partie, j’entends les premiers chants, alors qu’il fait encore nuit, j’observe dans l’obscurité, mes sens sont tous éveillés malgré la fatigue, et enfin je distingue une silhouette sur un névé, avec un ciel nuageux en toile de fond… la partie de plaisir peut commencer !

tétras lyre en pleine nuit

chant d'un tétras lyre en chartreuse— A suivre  —